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Faut-il préférer l'eau du robinet, plus écologique, à l'eau en bouteille, qui revendique un avantage santé ? Quelques éléments pour y voir (un peu) plus clair en eaux troubles...

Les besoins individuels en eau potable sont estimés entre 1 et 2 litres par jour pour un adulte : l’eau, qu’il s’agisse d’eau « du robinet » ou d’eau en bouteille, hydrate l'organisme et apporte une ration importante de minéraux – calcium, magnésium et potassium - indispensables à la santé. Perçues comme plus sûres et de meilleure qualité, les eaux en bouteille sont de plus en plus populaires : leur consommation a doublé, dans le monde, entre 1997 et 2005 (la France est le septième pays le plus consommateur, tandis que les Etats-Unis, le Mexique et la Chine forment le trio de tête) . Dans les pays industrialisés, les consommateurs disent être en quête de praticité, de goût et de sécurité alimentaire tandis que dans les pays en développement, ils cherchent à se protéger contre les maladies hydriques liée à l’eau courante dont la qualité laisse encore souvent à désirer. Même dans les pays ayant accès à une eau potable sûre, les consommateurs préfèrent parfois dépenser  en moyenne 300 fois et parfois jusqu’à 1000 fois plus pour boire de l’eau en bouteille . Tout cela, pour un impact environnemental à vous couper la soif et un prix qui est aussi payé par plus d’un milliard d’individus dans le monde n’ayant toujours pas accès à l’eau potable, selon les ONG qui soutiennent que le pompage excessif des sources pour produire de l’eau en bouteille menace les nappes phréatiques et l’équilibre des écosystèmes…

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Le saviez-vous ?

  • Dans le monde, 89 milliards de litres d’eau en bouteille sont engloutis chaque année (environ 15 litres par an et par personne), ce qui représente des ventes totales de 22 milliards de dollars  (près de 28 fois le budget de l’organisation des Nations-Unies pour l’alimentation et l’agriculture). L’Europe occidentale est de loin le plus gros consommateur d’eau en bouteille, avec 46% de la consommation mondiale et 85 litres par personne et par an . Et les grands groupes dominent le marché : ainsi en France, Nestlé Waters (Suisse), Danone (France) et Neptune (France - maison-mère du distributeur de vins Nicolas) représentent 80% des ventes.
  • Toutes les eaux en bouteille ne se ressemblent pas : les principales sont l’eau minérale naturelle (une eau souterraine naturellement protégée contre les risques de pollution, caractérisée par l’interdiction de traitement ou d’ajout et par une teneur constante en minéraux ou oligo-éléments – ce qui ne signifie pas qu’il existe une teneur minimale pour mériter l’appellation, contrairement à une idée reçue), l’eau de source (issue d’une formation souterraine et s’écoulant naturellement à la surface de la terre, qui ne peut être captée qu’à la source – en sachant que des eaux de différentes sources peuvent être commercialisées sous une même marque) et l’eau purifiée (eau souterraine ou de surface traitée pour s’adapter à la consommation humaine, qui ne se différencie de l’eau du robinet que par sa distribution en bouteilles)…
  • Le problème principal de l’eau en bouteille n’est pas l’ivresse mais le flacon : 70% de l’eau en bouteille vendue dans le monde l’est dans des bouteilles en plastique, l’industrie de l’eau en bouteille utilise 1,5 million de tonnes de plastique chaque année, et un cinquième seulement de ces bouteilles sont recyclées - la production étant moins coûteuse que le recyclage . Au total, préférer l’eau du robinet à l’eau minérale ferait économiser dix kilos de déchets par an et par personne . Sans parler des économies en espèces sonnantes et trébuchantes, puisque l’eau du robinet coûte 100 à 300 fois moins cher que l’eau en bouteille, 80 % du prix de l’eau en bouteille étant d’ailleurs dû à l’emballage  ;
  • A cela s’ajoute le coût écologique du transport le plus souvent routier : 25% de l’eau en bouteille de la planète n’est pas consommée dans son pays de production  et en France, l’eau en bouteille parcourt en moyenne 300 kilomètres avant d’arriver dans notre verre . Autant d’émissions de CO2 qui sont évitées en préférant l’eau du robinet…
  • En France, la bataille commerciale et publicitaire entre eaux en bouteille et eau du robinet bat son plein… Après une campagne fin 2006 du Syndicat des eaux d’Ile-de-France (Sedif) vantant les qualités économiques et écologiques de son produit, la marque d’eau en bouteille Cristaline (groupe Neptune) a réagi début 2007 avec une publicité remettant en cause les qualités gustatives mais aussi sanitaires de l’eau du robinet – s’attirant les foudres de toutes les associations écologistes (France Nature Environnement, WWF, Agir pour l'environnement, le Centre National d'Information Indépendante sur les Déchets la Confédération Nationale du Logement, Résistance à l'Agression Publicitaire, etc.) mais aussi de la Mairie de Paris et du Ministère de l’Ecologie et du Développement Durable !
  • Sur le plan social aussi, l’eau en bouteille a un arrière-goût discret mais bien réel : dans certains pays comme le Mexique (second consommateur d’eau en bouteille au monde), la faiblesse des nappes phréatiques impose désormais de vendre de l'eau déminéralisée, obtenue en retraitant de l'eau de mer ou de l'eau de pluie. Les enfants ont moins de chance que d’autres d'avoir du calcium pour faire grandir leurs os, et comme le goût de l'eau n'est pas agréable, ils se rattrapent en consommant jusqu’à 1 l de boisson sucrée par personne et par jour, soit 12 à 24 morceaux de sucres supplémentaires… Résultat : l'obésité a progressé de façon galopante, malgré la faiblesse des revenus individuels. Tout cela n’arrange rien au manque d’eau, puisqu’il faut 5 litres d’eau pour produire 1 litre de soda. Et les ONG dénoncent cette autre "privatisation" de l'eau, argumentant que le commerce de l’eau embouteillée encourage les pouvoirs publics à ne pas investir dans la qualité de l'eau potable et génère une accumulation inutile d'emballages…
  • Du point de vue de l'impact sur la santé, par contre, la controverse monte. Selon un article du quotidien Le Monde paru début 2009, l’eau de nos rivières et nappes phréatiques, mais aussi du robinet, serait contaminée par les résidus médicamenteux évacués via les eaux domestiques des patients (urines et autres rejets). En réalité, les sources de cette pollution sont un peu plus variées : on y trouve aussi les effluents des industries et ceux des hôpitaux (comprenant notamment les excréments des patients), les rejets animaux issus des élevages, ainsi que les médicaments non utilisés et jetés aux toilettes, malgré les systèmes de collecte. Il reste que le Vatican a, de manière un rien opportuniste, pris position début 2009 contre la pilule contraceptive, accusée d’avoir "des effets dévastateurs sur l'environnement". Ce soupçon est alimenté par des études récentes, théoriquement plus "neutres" : un rapport de l'Académie nationale de pharmacie française fin 2008 confirme qu’on trouve  "des traces de substances médicamenteuses ou de leurs dérivés dans les eaux superficielles et souterraines, dans les eaux résiduaires, dans les boues des stations d'épuration utilisées en épandage agricole et dans les sols"… mais aussi dans les eaux "destinées à la consommation humaine".  Problème : le traitement de ces résidus médicamenteux, quoique techniquement possible, ne figure pas dans les consignes données aux entreprises en charge de l’assainissement de l’eau ou de la potabilisation, alors même qu’ils pourraient présenter un danger potentiel pour l'environnement et la santé, via l'ingestion régulière de faibles doses. Signalons au passage que David Servan-Schreiber, dans  "Anti-Cancer", ne prend pas réellement position sur ce sujet précis, tout en recommandant quand même de boire de l’eau minérale ou de l’eau du robinet filtrée (les filtres éliminent les pesticides, les métaux lourds, le plomb, le calcaire, le cuivre, l’aluminium… mais pas les éventuels résidus de médicaments jusqu’à nouvel ordre). Voici en tout cas qui devrait arranger les fabricants d’eau en bouteille, dont les ventes ont plongé de 15% entre 2004 et 2008 (6% seulement pour les eaux de Danone en 2008) mais voilà aussi de quoi accroître pour les consommateurs le dilemme eau du robinet contre eau en bouteille…
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Bonnes nouvelles


  • Le goût chloré de l’eau du robinet n’est pas une fatalité ! Si 27% seulement des Français sont satisfaits de l'eau du robinet en 2005 (contre 41% en 1998) , c’est qu’ils critiquent son goût doublement chloré depuis les attentats du 11 septembre (tout en la consommant de plus en plus, comme en témoigne la chute de 3 % du marché de l'eau en bouteille ) : pour garantir la qualité bactériologique de l’eau pendant son transport, on y ajoute en effet du chlore, dans des quantités qui ne présentent pas de risque pour la santé mais qui peuvent laisser un goût désagréable. Le paradoxe est que le chlore est justement là pour donner l’alerte en cas d’attaque chimique puisqu’il réagit avec la plupart des polluants ! Mais il est facile de faire disparaître l’éventuel goût chloré en laissant l’eau s’aérer dans une carafe  pendant quelques heures au réfrigérateur.
  • A l’encontre des idées reçues, l’eau du robinet est le produit alimentaire le plus surveillé et à l’inverse, les eaux minérales ne sont pas toujours aussi « propres » que leur marketing le suggère. Surveillée par la réglementation française et européenne, l’eau du robinet destinée à la consommation humaine est soumise à de multiples analyses et doit respecter des normes de potabilité : selon le principe de précaution maximale, pas plus de 50 milligrammes/l de nitrates (fixée en fonction des risques encourus par la population la plus vulnérable : nourrissons et femmes enceintes) et 25 microgrammes/ de plomb. Un bilan de la direction générale de la Santé a d’ailleurs montré, en France, que 95 % de la population a été alimentée en 2004 par une eau conforme toute l’année. Les exceptions existent néanmoins, liées à des contextes locaux particuliers (par exemple pollution de l’eau dans des zones où est pratiquée une agriculture intensive : épandage d'engrais et de pesticides, déjections des animaux d'élevage…). Ainsi, un rapport de 2005 du ministère de la santé, utilisant des données de 2002 , a montré que 9% de la population était alimentée par une eau dont la teneur en pesticides n'était pas conforme en permanence aux limites de qualité réglementaire, et que 2% des débits d’eau produits n'étaient pas conformes à la limite de qualité en nitrates de 50 mg/l.
  • Pour ce qui concerne les eaux minérales, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a annoncé début 2007 les résultats d’une enquête menée dans treize régions sur les eaux minérales naturelles embouteillées en France ou dans l’Union européenne. Bilan : 22% de non-conformité avec, selon les cas, des concentrations en baryum, fluor, et manganèse, supérieures à la limite, ou au contraire des déficits en minéraux par rapport aux teneurs indiquées (magnésium notamment) .
  • Un Français sur deux pense que les eaux usées sont retraitées en usine pour produire de l’eau potable : c’est fort heureusement faux, puisque la production d’eau potable et la dépollution des eaux usées s’effectuent dans des usines différentes, ce qui exclut ce type de manipulation. Une fois « nettoyées », les eaux sales sont toujours évacuées vers le milieu naturel, qui a la capacité de la filtrer plus encore et de l’enrichir en minéraux avant de nous la restituer, bien plus tard, dans les rivières, les sources,…
  • En France, les deux tiers de l’eau du robinet provient de sources d’origine souterraine et a donc  très exactement la même provenance que l’eau de source embouteillée  (le reste provient de ressources superficielles -rivière, canal, lac…- qui peuvent contenir des pollutions devant être traitées pour rendre l’eau potable). Une proximité qui a contraint Coca-Cola à annuler le lancement européen de son eau Dasani en 2004, après que les médias aient révélé que l’eau arrivait en fait dans l'usine londonienne de Coca-Cola via les tuyaux de Thames Water, une compagnie britannique de distribution d'eau « du robinet ». Certes l’eau du numéro un mondial du "soft drink" était censée avoir subi une purification supplémentaire, mais ce processus aurait engendré un taux de bromate supérieur aux normes britanniques autorisées - d'où l’indignation des associations de consommateurs et la campagne de presse à l'origine du retrait .
  • La mobilisation contre l’eau en bouteille gagne du terrain : la chaîne hotellière engagée Scandic propose ainsi à ses clients, dans les chambres, une jolie carafe ornée d’une étiquette expliquant que l’eau du robinet est de grande qualité en Suède et que c’est aussi une solution plus écologique ; le Maire de San Francisco, Gavin Newsom, a interdit en 2007 la consommation d’eau en bouteille dans l’ensemble des services et bureaux de la ville et du comté, et encourage également ses concitoyens à prendre l’engagement de ne plus consommer de l’eau en bouteille (en contrepartie de quoi il leur offre une bouteille réutilisable en métal) ; enfin, après la carafe design "Eau de Paris" mise en place il y a quelques années, la communauté d'agglomération de Rouen a lancé en 2007 une jolie carafe « Eau de l’agglo » pour promouvoir l'eau du robinet…
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Ce que vous pouvez faire

  • D’abord, si vous doutez de la qualité de leur eau du robinet, renseignez-vous et comparez : depuis 2000, une note sur la qualité de l’eau, établie par l'Agence Régionale de Santé (ARS), est obligatoirement jointe une fois par an aux factures. Il est également possible de faire contrôler son eau par l'ARS et ses prestataires, en appelant par exemple à Paris le 01 58 578 12 04. Autre option : consulter les résultats des analyses sur le site du CRECEP ou dans votre Mairie où ils doivent être affichés.


  • Une fois rassuré(e), achetez une belle carafe et, même pour un dîner, tentez l’eau du robinet en la laissant s’aérer quelques heures au réfrigérateur ! Et si vraiment vous continuez à craindre un arrière-goût, faites comme les restaurants branchés : ajoutez-y avant de servir une rondelle de citron, ou quelques feuilles de menthe fraîche…
  • Une autre solution, qui a le vent en poupe : les purificateurs d’eau domestique et autres carafes filtrantes, qui ont fait leur entrée dans l’hexagone au début des années 90 dans les magasins bio (notamment avec la marque Brita, leader du marché devant Culligan, Terraillon et Kenwood). Ce système filtrant, qui  déjà séduit 2 millions de Français , repose sur une cartouche (recyclable et bénéficiant généralement d’un système de récupération très sophistiqué via les points de vente), qui, par l'action d'une résine échangeuse d'ions et par du charbon actif, réduit le calcaire, le plomb, le cuivre et l'aluminium, et agit contre le chlore, les pesticides et impuretés organiques tout en préservant les minéraux essentiels comme le calcium et le magnésium. Utilisable pour l’eau froide et l’eau chaude (pour le thé, le café…) et même pour les fleurs, ce système existe aussi désormais en filtre qui se branche directement sur le robinet, et Electrolux vient même de lancer un tout nouveau frigo à distribution d'eau filtrée.
  • Enfin si, comme la moitié des Parisiens, vous ne pouvez pas vous empêcher de boire régulièrement de l’eau embouteillée, mettez-vous au tri, si ce n’est pas déjà fait : donnez l’exemple à vos enfants, compressez les bouteilles vides pour réduire l’encombrement de vos poubelles, et mettez-les bien dans les poubelles réservées aux déchets plastique. Et pour boucler la boucle en toute bonne conscience, achetez des laines polaire faites à partir de bouteilles en plastique recyclées !
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